RECHERCHES
SUR
LE PERFECTIONNEMENT INDIVIDUEL
Par
Mokhtar LAKEHAL, docteur d’Etat ès Sc. économiques, licencié ès Sc. sociales,
maître de conférences à Sciences-Po Paris, chargé de cours à Paris 3
Sorbonne-Nouvelle et à l’UPEC-Paris 12
« SOMMES-NOUS ASSEZ EDUQUES POUR
VIVRE ENSEMBLE»
«Lorsque les pères s’habituent à
laisser faire les enfants, lorsque les fils ne tiennent plus compte de leurs
paroles, lorsque les maîtres tremblent devant leurs élèves et préfèrent les
flatter, lorsque finalement les jeunes méprisent les lois parce qu’ils ne
reconnaissent plus au-dessus d’eux l’autorité de rien et de personne, alors
c’est là en toute beauté et en toute jeunesse le début de la tyrannie.» (Platon, La République).
«La meilleure
chose qu'un parent puisse léguer à son enfant, c'est une bonne éducation» (Mohamed, prophète
de l’Islam)
N’attendez rien de la famille pour vous
instruire, de l’école pour vous éduquer et des deux institutions pour vous
cultiver. Car la famille éduque, l’école instruit et la curiosité personnelle
cultive.
Mais la famille moderne ne dispose plus du
temps nécessaire pour éduquer méthodiquement l’enfant. Depuis le début des
années quatre-vingt elle se débat dans sa crise identitaire sans fin. Une crise
qui a conduit les sociétés individualistes à se décharger sans consentement sur
les enseignants pour combler les lacunes éducatives familiales, en plus
d’assumer leur rôle statutaire de formateurs des futurs producteurs,
consommateurs et citoyens.
Ce déséquilibre dangereux a conduit à une
crise identitaire de l’école, puis de la société entière et maintenant de plus
en plus de jeunes sans repères, livrés à eux-mêmes, ne savent plus réellement
pourquoi ils fréquentent l’école et doivent respecter certaines règles et
normes, et quel intérêt pour eux de se soumettre à l’autorité du père, de la
mère, du professeur ou à l’autorité publique (policier, gendarme, inspecteur,
parlementaire, magistrat, ministre, chef d’Etat), puisqu’ils ne trouvent pas
dans ces autorités le bon exemple à suivre.
Un jour
une mère dit à son fils de six ans : « Nous sommes en
démocratie, chacun fait ce qui lui plait». Ce gamin n’avait-il pas besoin
plutôt d’entendre d’un adulte: « En France, chacun doit faire ce qui est
bon pour tous, parce que les autres font déjà beaucoup de choses pour
lui» ? Payer ses impôts et taxes, respecter les règles et les normes,
c’est bon pour tous. A priori vivre
en paix et profiter légitimement, grâce à l’effort collectif, de toutes les infrastructures
et les services publics, c’est bon seulement pour soi. Mais a posteriori un individu heureux et
épanoui est un gage de tranquillité pour ses voisins, collègues et personnes en
rapports avec lui. Au contraire, si chacun devait réellement ne faire que ce
qui lui plait, le pays deviendrait ingouvernable, et comme on ne peut pas avoir
60 millions de rois et de reines entretenus par des travailleurs immigrés, des
millions de familles s’exileraient dans des pays où l’individu ne fait pas ce
qui lui plait mais uniquement ce qu’il a le droit de faire.